Contrôle fiscal: Le fisc met le turbo

Contrôle fiscal: Le fisc met le turbo

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Comment peut-on déclarer 200.000 DH de revenus par an et acquérir pour 73 millions de DH de biens immeubles? C’est l’équation qu’un médecin devra expliquer à l’administration fiscale. Cet exemple est bien réel. Il a été révélé par Mustapha Aman, directeur du contrôle à la Direction générale des impôts.

Ce cas est symptomatique de l’ampleur de la fraude et l’évasion fiscale chez certains professionnels. L’administration fiscale a décidé cette année de lui déclarer la guerre. Le fisc est parti du constat suivant: bien des professionnels, dont les revenus dépassent parfois les résultats de grosses PME, ne contribuent qu’à 14% des recettes de l’impôt sur le revenu contre 74% pour les retenues sur salaire.

Certains paient entre 20.000 et 30.000 DH d’IR  à peine alors qu’ils brassent parfois plusieurs millions de dirhams par an.

Le plan d’attaque de l’administration visera également les déficitaires chroniques qui représentent plus de 60% des entreprises immatriculées à l’IS. Il s’agit de sociétés qui déclarent régulièrement des pertes sans jamais mettre la clé sous le paillasson. Ce qui veut dire que les dirigeants fraudent. Par conséquent, à l’exception des structures dont le déficit s’explique les trois ou quatre premières années d’installation, tous les autres déficitaires sont prioritaires au contrôle.

Dans la ligne de mire du fisc, figurent également les faux bénéficiaires. Ce sont des entreprises qui déclarent un bénéfice net minoré de façon à payer à peine l’équivalent de la cotisation minimale. «Ces contribuables se retrouvent dans la même situation que les déficitaires chroniques», prévient le directeur du Contrôle à la DGI.

Les forfaitaires, surtout les faux d’entre eux sont également dans le radar des services des Impôts. Ils seront rattrapés grâce à l’examen de l’ensemble de leur situation fiscale.

Dans le viseur du fisc, les «spécialistes de la fraude» à la TVA. Beaucoup de contribuables la considèrent comme un complément de la marge bénéficiaire alors qu’ils devraient jouer un rôle de collecteur d’impôt pour le compte du Trésor. Une pratique qui explique que beaucoup de sociétés se trouvent dans une situation de crédit de TVA.

Si l’on prend l’exemple des faux déficitaires, qui continuent à fonctionner «comme par miracle», les inspecteurs des impôts scannent la situation de l’ensemble des actionnaires ou des associés. Dans la plupart des cas, ils trouvent matière à redresser. Ce type de contrôle, qui cible les personnes physiques, s’appelle l’examen de l’ensemble de la situation fiscale.

C’est la parade à laquelle recourt l’administration pour retracer les flux financiers autour du faux déficitaire pour prélever l’impôt dû. Les fraudeurs ne peuvent plus acheter de biens immeubles au nom de leur conjoint, ni de leurs enfants pour tromper la vigilance des Impôts.

La DGI peut accéder à une base de données exhaustive de toutes les transactions immobilières réalisées depuis 2014 jusqu’à ce jour. Elle lui permet de savoir qui achète quoi grâce aux multiples possibilités de recoupements via différents identifiants : numéro de la carte d’identité, identifiant fiscal, ICE... Une base de données qu’elle capitalisera pour pister la fraude avec des «éléments factuels». Cette forme de contrôle sera de plus en plus utilisée pour appréhender la matière imposable au niveau de ces «niches fiscales».

En 2017, le contrôle fiscal a généré plus de 12 milliards de DH de recettes sur les 128 milliards de DH gérées par la DGI. Depuis quelques années, il est devenu un important contributeur aux recettes.

Avec la dématérialisation de l’ensemble de ses activités et de ses services, y compris les réclamations et les demandes d’attestation, l’administration fiscale dispose maintenant des ressources suffisantes pour renforcer le contrôle. Au cours des prochaines semaines, une centaine de nouveaux cadres seront redéployés aux côtés des 486 vérificateurs actuels.

D’ici fin 2018, l’administration fiscale comptera 1.000 personnes dédiées à la vérification. Ce qui permettra d’augmenter de 41% le nombre d’opérations de contrôle. Soit environ 5.600 dossiers contre 3.977 en 2017.

www.leconomiste.com/article/1027918-controle-fiscal-le-fisc-met-le-turbo